Escobar

Escobar

Article publié le 23 octobre 2020 par Full-Time Cinéma.

Impitoyable et cruel chef du cartel de Medellin, Pablo Escobar est le criminel le plus riche de l’Histoire avec une fortune de plus de 30 milliards de dollars. « L’empereur de la cocaïne » met la Colombie à feu et à sang dans les années 80 en introduisant un niveau de violence sans précédent dans le commerce de la drogue. Fascinée par son charisme et son pouvoir, la très célèbre journaliste Virginia Vallejo va s’apercevoir qu’on ne s’approche pas de la l’homme le plus dangereux du monde impunément…

Pablo Escobar est devenu dans la culture cinématographique un monstre mythique. Dans Escobar, Javier Bardem a choisi de l’interpréter comme un anti-héros complexe et intriguant. Tourner un film sur le célèbre narcotrafiquant colombien était une envie qu’avait l’acteur depuis bien longtemps. C’est avec le réalisateur Fernando Leon de Aranoa que la bonne occasion s’est présentée. Prendre le point de vue de la journaliste Virginia Vallejo, qui a eu une longue liaison avec Pablo Escobar, c’est ce qui rend le film différent de ce que l’on connaît du narcotrafiquant. Le film est librement inspiré du livre écrit par la célèbre présentatrice de télévision colombienne, où elle raconte sa relation avec Escobar.

Le duo explosif Cruz-Bardem

Escobar est un film de personnages. Ce qui compte ici, ce n’est pas les scènes d’action. Il y en a évidemment, mais elles ne sont pas clinquantes comme dans d’autre films ou séries sur les cartels de drogue. Escobar se concentre sur la psychologie de ses personnages principaux, du point de vue de la journaliste. L’avantage de son statut d’amante de Pablo Escobar, c’est qu’elle a réussi à entrer dans ce monde sans finalement en faire totalement partie. Elle livre donc un discours avec un peu de recul qui permet d’avoir une idée plus complexe de la personnalité d’Escobar au travers de leur relation.

Réunis une fois de plus sur le grand écran, ce sont les acteurs Javier Bardem et Penélope Cruz qui arrivent à faire vivre cette relation sulfureuse d’une manière grandiose. On ressent dans leur jeu une tension entre les deux personnages qui grandit tout au long du film, se transformant jusqu’à devenir une monstruosité étouffante pour le personnage de Virginia. Elle est étouffée au sens propre du terme, oppressée par les menaces qui arrivent sur elle de toutes parts, ne pouvant plus assumer sans risques son statut d’amante de l’homme le plus dangereux de Colombie. Penelope Cruz rit, s’amuse puis s’inquiète, se tord les mains, tremble, hurle, devient presque folle. Elle est plus que convaincante dans ce rôle qui montre une fois de plus qu’elle est l’une des plus grandes actrices de notre temps.

Javier Bardem, la cruauté tranquille

Javier Bardem fait un Pablo Escobar exceptionnel. Désormais habitué des rôles de grands méchants manipulateurs et charmeurs, il est évidemment parfait pour ce personnage décrit ici dans toute sa complexité. Il arrive à jouer sur toutes les facettes de la personnalité de Pablo Escobar. Bon père de famille tout en étant chef d’un cartel de drogue. Bienfaiteur dans des quartiers pauvres tout en devenant homme politique. Aspirant à l’indépendance de son pays, tout en provoquant un conflit le mettant à feu et à sang.

Avec ses yeux mis-clos et son jeu lent, Javier Bardem crée une sorte de personnage bonhomme qui a tout pour plaire mais qui peut s’avérer impitoyable et dangereux. Sa carrure en impose sans aucun doute à l’écran. Il prend de l’espace dans le cadre chaque fois qu’il y apparaît, et son regard désabusé est bien plus glaçant que tous les yeux rusés de ses collaborateurs.

Comment Robin des Bois devint un monstre

L’objet d’Escobar, bien plus que d’être un simple film sur les cartels de drogue, est d’explorer comment Pablo Escobar est passé dans l’imaginaire colombien de sorte de petit père des pauvres à monstrueux chef de cartel. Virginia illustre cette évolution de la perception de Pablo Escobar. Elle est au départ charmée par cet homme si sur de lui, devenu si rapidement riche, attaché à donner aux enfants des favelas un toit pour dormir. Il vend de la drogue certes, mais pour l’envoyer aux riches américains, pour permettre de financer ses projets pour la Colombie, alors qu’y a-t-il de mal à cela ?

Et puis viennent l’ambition, les rêves de reconnaissance, la politique et la descente aux enfers. Toute gloire s’accompagne d’ennemis. Et s’attaquer à Escobar, c’est réveiller le monstre qui est en lui. Ce film montre l’évolution si extrême du narcotrafiquant manipulateur dont la folie des grandeurs l’a mené à mettre son propre pays à feu et à sang.

Conclusion : Escobar réussit grâce à son choix de point de vue et à ses acteurs charismatiques et perfectionnistes à peindre le portrait d’un Pablo Escobar complexe. Une manière d’éclairer avec une nouvelle œuvre comment les narcotrafiquants ont fini par plonger dans les années 1980 la Colombie dans une sanglante guerre civile.

NOTE : 4/5 ★★★★